Rôle de la Cour de cassation
La Cour de cassation est une juridiction unique, qui comporte plusieurs chambres (cinq chambres civiles, une chambre criminelle). Chacune est spécialisée dans un domaine de compétence qui lui est propre. Le pourvoi en cassation a pour objet de faire sanctionner par une annulation – la cassation – une décision rendue en dernier ressort par un tribunal ou une cour d’appel. Cette annulation est décidée soit parce que cette décision a été rendue au terme d’une procédure irrégulière – c’est ce que l’on appelle le contrôle « disciplinaire » ; soit par ce que les juges ont fait une application incorrecte de la règle de droit – c’est le contrôle qualifié de « normatif ».
La Cour de cassation ne réexamine par le fond de l’affaire. On ne revient pas sur les faits devant la Cour de cassation (à quelques très rares exceptions près). Les faits sont censés avoir été constatés et appréciés par les juges de première instance ou d’appel. Les cas d’ouverture à cassation se divisent en deux catégories essentielles : le contrôle dit « normatif » et celui dit « disciplinaire».
Le contrôle « normatif »
La première forme de contrôle regroupe les cas d’ouverture correspondant au contrôle dit « normatif » qu’exerce la Cour de cassation. Ce contrôle porte sur la vérification du respect du sens et de la portée de la règle de droit et de sa correcte application par les juges d’appel. Il peut s’agir de loi elle-même, mais aussi des décrets, arrêtés, normes professionnelles, conventions collectives, etc.
La Cour de cassation exerce aussi un contrôle de la compatibilité de la norme de droit interne avec le droit de l’Union européenne. Elle peut être conduite à faire une application directe, au besoin en écartant la loi nationale si elle lui est contraire, du droit communautaire (Traité de l’Union, Directives, Règlements, etc.), de la Convention européenne des droits de l’homme ou d’autres conventions internationales.
Le principe suivant lequel la Cour de cassation contrôle l’interprétation de la norme par le juge du fond est assorti d’exceptions. La Cour de cassation ne contrôle ni la légalité des actes administratif ou réglementaire (principe de la séparation des pouvoirs) ni la constitutionnalité des lois.
Par ailleurs, ce que l’on appelle la « qualification juridique des faits » par le juge du fond, opération qui se trouve à la frontière entre le fait et le droit (ex : y a-t-il eu faute d’un salarié ? ; un plaideur était-il de mauvaise foi ? ; la Cour était-elle saisie une demande nouvelle irrecevable en appel ?, etc.) fait l’objet d’un contrôle par la Cour de cassation dont l’étendue est variable selon les matières.
Le contrôle « disciplinaire »
Les autres cas d’ouverture à cassation correspondent au contrôle disciplinaire par lequel la Cour de cassation s’assure que les juges du fond n’ont pas commis d’erreur de procédure. À ce titre, elle sanctionne le non-respect des « principes directeurs du procès » : la méconnaissance du principe de la contradiction, le défaut de motivation par le juge ou encore la dénaturation par celui-ci d’un écrit (lettres, attestations, contrats, etc.). Le contrôle de la Cour de cassation est essentiel. Il permet d’assurer la bonne application de la loi d’une façon unifiée sur l’ensemble du territoire. Il garantit à chacun la possibilité de faire vérifier par une juridiction spécialisée que son procès a été instruit et jugé suivant une procédure équitable, dans le respect des principes fondamentaux qui gouvernent la procédure, et que la loi a été correctement appliquée.
La procédure devant la Cour de cassation en matière civile
Le pourvoi en cassation en matière civile doit être introduit dans un délai de deux mois à compter de la signification à partie de la décision d’appel, ou du jugement de première instance si la voie de l’appel est fermée. L’appel à un avocat aux Conseils pour introduire le pourvoi et suivre jusqu’à son terme la procédure est obligatoire (hormis dans quelques rares matières).
Une fois le pourvoi introduit, l’avocat à la Cour de cassation dispose d’un délai de quatre mois pour déposer un mémoire ampliatif, qui doit contenir ses « moyens de cassation » et être assorti d’une discussion juridique destinée à en démontrer le bien-fondé. Benoît Soltner ne manque jamais de mettre à profit ce large délai pour échanger avec l’avocat à la Cour d’appel qui lui a transmis le dossier ou avec le client lui-même sur la meilleure stratégie à mettre en place, et leur adresser avant son dépôt le projet de mémoire préparé par son cabinet afin de recueillir leurs observations.
Après signification du mémoire, la partie en défense dispose d’un délai de deux mois pour déposer mémoire en défense, qui peut être assorti d’un pourvoi incident si l’arrêt déféré par son adversaire à la Cour de cassation ne lui a été favorable qu’en partie.
Le cours de ces délais est arrêté si le défendeur au pourvoi dépose une « requête en retrait du rôle ». Concrètement, il s’agit de demander à la Cour de cassation de retirer l’affaire du rôle et de suspendre tout examen du pourvoi s’il est avéré que le demandeur au pourvoi n’a pas exécuté les condamnations qui ont été prononcées contre lui. La règle est en effet que le pourvoi en cassation n’est pas suspensif d’exécution. L’examen de la requête demandant le retrait du rôle du pourvoi est assuré par un conseiller à la Cour de cassation qui siège tous les quinze jours et devant lequel les parties sont invitées à plaider.
À l’expiration du délai de défense, un conseiller à la Cour de cassation chargé d’examiner plus spécialement l’affaire est nommé (conseiller rapporteur). Il dépose un rapport, dont un volet, appelé communément la « partie publique », est communiqué aux avocats des parties qui peuvent, exceptionnellement, déposer des observations pour en discuter des mérites. Le dossier est ensuite distribué à un avocat général qui peut émettre un avis, auquel les parties sont libres de répondre. L’audience est ensuite fixée. Le délai moyen dans lequel une décision est rendue par la Cour de cassation est actuellement d’environ un an à compter de l’introduction du pourvoi.
Lorsque la Cour de cassation casse une décision, elle ne rejuge pas elle-même le litige, mais renvoie l’affaire devant une autre juridiction qui sera chargée de rejuger l’affaire en tenant compte des motifs pour lesquels la cassation a été prononcée. Cette juridiction, toutefois, n’est pas obligée de s’incliner devant ce qu’a jugé la Cour de cassation, ce qui peut alors donner lieu à un deuxième procès en cassation. Si le pourvoi est rejeté, l’arrêt qui était frappé de pourvoi devient irrévocable en mettant un terme au litige.
À noter qu’une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) peut, au stade du pourvoi, être posée au Conseil constitutionnel, lequel ne sera saisi que si la Cour de cassation estime, au vu d’un mémoire distinct préparé par l’avocat aux Conseils, que le litige soulève une question de constitutionnalité sérieuse (voir infra).
Le pourvoi en matière pénale
Devant la Chambre criminelle, une personne condamnée pénalement peut se pourvoir en cassation sans recourir à l’assistance d’un avocat aux Conseils. Mais, les cassations prononcées sur des pourvois de personnes condamnées pénalement et non assistées d’un avocat à la Cour de cassation sont infimes, ce qui s’explique par la très grande technicité que requiert la rédaction des moyens de cassation pour être recevables et pertinents, ce qui réclame le savoir-faire et l’expérience d’un avocat aux Conseils.
Le pourvoi doit être introduit dans un délai de cinq jours à compter du prononcé de la décision que la partie condamnée ou la partie civile entendent frapper de pourvoi. Ce pourvoi, et il faut être attentif à cette règle, doit être formé auprès du greffe de la juridiction qui a rendu la décision, par la partie elle-même ou par son avocat muni d’un pouvoir spécial. L’avocat aux Conseils n’a pas compétence pour introduire le pourvoi lui-même.
À compter du pourvoi, l’avocat aux Conseils dispose d’un délai d’un mois pour se constituer dans l’intérêt de son client auprès du greffe criminel de la Cour de cassation. C’est ensuite un conseiller à la Chambre criminelle de la Cour de cassation, chargé de l’examen du pourvoi, qui fixera à l’avocat à la Cour de cassation un délai pour présenter son mémoire ampliatif contenant, comme en matière civile, les « moyens de cassations » qui saisiront la chambre criminelle. Une fois ce mémoire déposé, ce conseiller fixe au défendeur un délai pour présenter ses observations en défense.
Le conseiller déposer ensuite un rapport, dont une partie, comme en matière civile, est transmise aux avocats qui peuvent déposer des observations. La « partie publique » est cependant très succincte en matière pénale et se résume le plus souvent en un rappel de la procédure et des moyens présentés, ce qui n’appelle guère d’observations. Le dossier est distribué ensuite à un avocat général qui est libre de délivrer un avis motivé, ce qu’il ne fait que dans les affaires qu’il juge suffisamment importantes. Une audience est ensuite fixée.